En ce 24 juillet 2024, sous les lourds rideaux du palais de justice de Kinshasa-Gombe, se déploie un drame qui, en surface, prétend marquer une page décisive de l’histoire congolaise.
Le tribunal s’ouvre pour juger Corneille Nangaa, leader de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), entité politique affiliée au M23, qui domine une partie du Nord-Kivu, région déchirée par le conflit depuis plus de deux ans.
La scène est retransmise en direct sur la télévision nationale, comme une fresque orchestrée pour captiver les regards. L’audience débute avec la lecture des accusations et l’identification des cinq accusés présents.
Eric Nkuba Shebantu, conseiller stratégique de l’AFC, se tient parmi eux, épuisé, sa tête rasée et sa barbe grisonnante trahissant des mois d’isolement. Accusé de trahison, il se retrouve dans l’ombre d’un régime qui vient de réactiver la peine de mort. Bien que son admission comme membre fondateur de l’AFC soit avouée, il choisit de se taire et de consulter ses avocats avant de répondre aux accusations.
Pourtant, derrière le masque de cette audience se cachent des enjeux plus profonds et plus sombres. Vingt accusés sont jugés par contumace, laissant dans l’ombre des noms notoires comme Sultani Makenga, Bernard Byamungu, Bertrand Bisimwa, Willy Ngoma, et Lawrence Kanyuka. Ces figures historiques, absentes du tribunal, se cachent dans des zones échappant au contrôle de l’État congolais ou se trouvent en exil, hors de portée des autorités judiciaires.
Le procès devient ainsi un théâtre de diversion, un écran de fumée masquant les véritables crises que le gouvernement congolais tente d’éviter. En concentrant l’attention sur ce procès, le régime semble vouloir détourner les regards des problèmes internes, des scandales de corruption et de détournements de fonds qui rongent la République Démocratique du Congo. Les révélations de malversations financières et les enquêtes sur la mauvaise gestion des ressources publiques sont ainsi mises en retrait, tandis que l’audience brille sous les projecteurs.
Simultanément, ce procès sert de couverture aux difficultés du gouvernement dans ses négociations avec l’AFC et d’autres groupes rebelles. En mettant en avant un procès de haute envergure, les autorités congolaises projettent une image de fermeté et de contrôle, tout en évitant de se pencher sur les compromis délicats nécessaires pour résoudre le conflit.
Enfin, ce spectacle judiciaire s’inscrit également dans une tentative de redorer l’image internationale du régime. En mettant en scène un procès contre des figures d’opposition et des accusations graves de trahison, le gouvernement espère apaiser ses partenaires internationaux préoccupés par les critiques croissantes concernant sa gouvernance et ses pratiques. Le procès devient ainsi un symbole de résistance nationale, une tentative de montrer que le régime reste maître de son destin, malgré un isolement diplomatique croissant.
En somme, ce procès de Corneille Nangaa n’est pas seulement un affrontement judiciaire, mais une chorégraphie politique visant à masquer les véritables défis du gouvernement congolais. Sous le scintillement des caméras et les éclats de l’audience publique, le drame de la diversion continue de se jouer, laissant dans l’ombre les crises plus profondes et les véritables luttes du pays.
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